Page:Myrand - Frontenac et ses amis, 1902.djvu/163

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
147
APPENDICE

cite. À ce sujet la tradition rapportait d’après le Frère Louis, etc ; il paraît, d’après M. le major Lafleur et M. de Gaspé ; la petite boîte de plomb se trouvait, dit-on, sur son cercueil, etc ; — M. Thompson avait vu, paraît-il, etc., etc. Comme il hésite, comme il craint, et certes avec raison, d’être trop affirmatif ! Comme il lui répugne de laisser imprimer dans son Dictionnaire Généalogique ce racontar, diffamatoire au premier chef. Son flair d’historien ne le trompe pas : cette anecdote sent mauvais, elle fleure la calomnie à cent pas ; de suite, sa conscience d’honnête homme en éprouve le pressentiment et la répugnance.

Par bonheur ce potin empoisonné renferme sa propre antidote. Pour peu que l’on observe et lise attentivement on la trouve à la page même de l’ouvrage cité. Il suffit, en effet, de comparer les témoignages de Mgr Plessis et de M. de Gaspé : tout cet échafaudage d’inexactitudes, si laborieusement édifié, s’écroule à plat comme un château de cartes.

Mais entrons plus avant dans la minutie des détails. La calomnie est un bacille qui requiert, plus que tout autre microbe dangereux, un examen microscopique.

Disons d’abord un mot de la personnalité des témoins, avant de peser la valeur de leurs dépositions.

Barthélemy Simon dit Lafleur — le futur major Lafleur — naquit à Québec le 23 août 1794. Conséquemment, il avait deux ans à peine le 6 septembre 1796, date de l’incendie du couvent des Récollets. Impossible donc de le considérer comme un témoin oculaire qui se rappelle avoir vu la fameuse boîte de plomb déposée sur le cercueil de Frontenac.[1]

M. de Gaspé, l’aimable auteur des Anciens Canadiens, Philippe-Aubert de Gaspé, avait dix ans en 1796. Lui-même nous l’apprend dans ses Mémoires (p. 55) : « J’ai toujours aimé les Récollets : j’avais dix ans, le 6 septembre de l’année 1796, lorsque leur communauté fut dissoute après l’incendie de leur couvent et de leur église. »

Doit-on récuser son témoignage à cause de son âge ? Mais

  1. Barthélémy Simon dit Lafleur mourut officier du Bureau de la Trinité, à Québec, le 10 août 1874, à l’âge de 80 ans.