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ET SES AMIS

célèbre artiste, plus de deux cents portraits exécutés par le Bernin. Celui de la Divine Anne de la Grange-Trianon lui appartient peut-être, car, rappelons-nous que le tableau du Musée de Versailles n’est pas signé d’un nom d’auteur. Cet anonymat, à mon avis, justifie cette hypothèse. N’est-il pas, en effet, naturel et logique de penser que le noble Italien, mû par un sentiment de galanterie, de reconnaissance ou d’amitié, songea à offrir à ses hôtes leurs bustes ou leurs portraits ? La nomenclature de ces deux cents personnages dont il est parlé aux manuels doit nécessairement avoir été publiée dans quelqu’un des ouvrages consacrés à l’histoire ou à la critique de Bernini considéré sous les trois aspects de son immense talent, comme peintre, statuaire et architecte. Ce livre, on le trouverait sûrement dans l’une ou l’autre de ces merveilleuses bibliothèques qui, mieux encore que leurs monuments historiques, constituent les vrais trésors de Paris et de Rome. On pourrait établir alors si le nom de Messire Louis de Buade, comte de Frontenac, apparaît sur la bienheureuse liste. Sa présence constatée, il ne restera plus qu’à retrouver le portrait même.

Cette recherche mènera loin, beaucoup plus loin qu’il ne le pense, celui de nos antiquaires qui aura eu le beau courage de l’entreprendre et de la poursuivre à travers les archives, particulières ou publiques, de l’histoire de France.

Savoir que le portrait de Frontenac est de Bernini n’est qu’un piètre renseignement pour qui veut lui donner la chasse. Je plains d’avance les bibliophiles s’ils n’ont que cette information pour s’orienter et j’augure mal de leur descouverture, comme on disait au temps de Jacques Cartier.

Qu’il soit ou non catalogué dans l’œuvre de Bernini, le portrait de Frontenac n’en sera ni plus ni moins trouvable. Il demeurera ce qu’il est : un trésor caché. Un jour, peut-être, à l’heure la plus inattendue, le Hasard le découvrira. Et l’on regrettera, mais trop tard, d’avoir abandonné à cet aveugle le mérite et le soin d’une aussi