CHAPITRE III
La troisième des sœurs de Frontenac, Henriette-Marie de Buade, était une des grandes dames du dix-septième siècle, et sa princière demeure une véritable annexe de l’Académie. Les candidats au bel esprit y faisaient stage et antichambre. Son salon, à cette époque on disait couramment alcove et ruelle, son salon était ouvert à tout ce que le grand et beau monde du royaume comptait de plus illustre et de plus raffiné. Les quatre aristocraties sociales : celles de l’esprit, de la politique, de la richesse et de la naissance s’y disputaient les tabourets. Comme à l’hôtel de Rambouillet, on n’y demandait aux gens de lettres d’autre passe-port que l’esprit, esprit que la conversation mettait aux prises avec ce que la Ville et la Cour possédaient de plus fin et de plus recherché.
C’était donc une famille essentiellement lettrée que ces Frontenacs et ces Montmorts, vivant dans un milieu exclusivement intellectuel, jouissant d’une notoriété dans le monde des sciences et des arts, et qui, par ses relations sociales, ses nobles alliances, exerçait un prestige et une influence politique considérables. Déjà, à cette époque, l’hôtel de Rambouillet faisant école, l’échelle des valeurs sociales s’était modifiée, les distances avaient diminué entre le savoir et la naissance, l’homme de lettres et l’homme de qualité. L’autorité de cette fameuse alcôve,