Page:Myrand - Frontenac et ses amis, 1902.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
104
FRONTENAC

Si Frontenac se piquait de littérature, la toute belle Anne de la Grange, sa femme, se piquait de bel esprit. Et, de sa part, il n’y avait aucune fatuité à y prétendre. N’avait-elle pas été surnommée la Divine, par le siècle même de Louis XIV, précisément à cause de son étincelant esprit ? Ce titre, glorieux entre tous, elle le partagea loyalement et cordialement avec sa plus grande amie personnelle, Mademoiselle d’Outrelaise, qui l’avait reçu tout d’abord de ses admirateurs. Elles furent les premières causeuses d’une époque où la conversation était réputée l’art suprême.

« Madame de Frontenac, nos dit Pierre Margry, fut une femme des plus remarquables par son rôle et par son esprit, dans un temps où tant d’autres femmes célèbres laissèrent un nom illustre après elles. »

Deux siècles avant lui, Saint-Simon, qui ne pardonna jamais à la fille du teneur de livres son origine plébéienne, avait eu cependant l’honnêteté d’écrire à son sujet :

« Madame de Frontenac était une personne d’esprit et d’empire, et de toutes les bonnes compagnies de son temps. »

« Madame de Frontenac, disait-il encore dans ses Mémoires, devenue extrêmement vieille — elle mourut à l’âge de soixante-quinze ans, — voyait encore chez elle force bonne compagnie. »

En effet, elle est de toutes les fêtes. La spirituelle marquise de Sévigné écrit à Madame de Grignan, en date du 27 avril 1671 :

« Je soupai l’autre jour chez la marquise d’Huxelles[1], avec Madame la maréchale d’Hunières[2], Mesdames d’Arpajon, de Beringhen[3], de Frontenac,

  1. Une tante de Frontenac.
  2. Une autre tante de Frontenac.
  3. Anne du Blé, belle-sœur de la marquise d’Huxelles.