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ET SES AMIS

Voilà comment M. Pierre Margry, l’éminent archiviste parisien, entendait la critique de l’histoire. Tout esprit droit admettra la saine logique et la parfaite honnêteté de ces raisons.

Dix ans plus tard, au cours d’une soutenance qui fit grand bruit en Sorbonne — La sincérité religieuse de Chateaubriand — M. l’abbé Georges Bertrin se prononçait exactement comme Margry au sujet de cette critique, méprisable autant que malpropre, qui cherche uniquement et toujours « la petite bête, » jusque sur la tête des statues élevées aux grands hommes.

Voici comment il flagellait ces mouchards de l’histoire :

« Paroles ou actions répréhensibles, défaillances de vertu petites ou grandes, le critique recueille tout avec un soin méticuleux. Il fouille dans sa mémoire et dans celle d’autrui, il court de toutes parts, à la recherche,


    quoique je regrette de n’avoir pu peindre le tableau que je voyais et que je ne ferai pas sans doute, ayant tant d’autres études à poursuivre, ne vivant que par les soins dont j’ai été entouré depuis treize ans. Ce chiffre funeste, peut-être le compterez-vous un jour parmi vos preuves à l’appui à propos de moi.
    « Je me laisse aller au bavardage de la vieillesse ; je vous en demande pardon. Je retourne volontiers en arrière avec un jeune homme à qui je souhaite de le rester longtemps. Pour le moment je tâche, par d’autres travaux, de me persuader, avec Bossuet, que la vie date des cheveux blancs. Cela est peut-être vrai ; mais employez autant que vous pourrez le temps des cheveux noirs.
    « Veuillez, avec mes nouveaux remerciements, Monsieur, croire à mes sentiments les plus distingués.

    Pierre Margry. »

    Comme on le voit ce bon vieillard avait la superstition du nombre 13. Il ne lui a point porté malheur cependant. Le sympathique écrivain n’est pas mort en 1891, comme il le semblait redouter, mais trois ans plus tard, le 27 mars 1894. L’annonce de son décès, dans le Paris-Canada du 5 mai 1894, a été pour l’Honorable Hector Fabre, notre distingué haut commissaire canadien en France, l’occasion d’écrire dans ce journal l’une de ses pages les plus émues. Je la publie in extenso à l’Appendice.