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Tu peux sembler commettre, il est vrai, quelque erreur :
Ta main n’est pas toujours bien sûre, et ta colère
Ménage obscurément ceux qui savent te plaire,
Épargne l’insensé, respecte l’imposteur,
Laisse blanchir le vice et languir le malheur.

VIII

Mais, quand la noble enfant d’une race royale,
Fuyant des lourds palais l’antique oisiveté,
S’en va dans l’atelier chercher la vérité,
Et là, créant en rêve une forme idéale,
Entr’ouvre un marbre pur de sa main virginale,
Pour en faire sortir la vie et la beauté ;

IX

Quand cet esprit charmant, quand ce naïf génie
Qui courait à sa mère au doux nom de Marie,
Sur son œuvre chéri penche son front rêveur,
Et, pour nous peindre Jeanne interrogeant son cœur,
À la fille des champs qui sauva la patrie
Prête sa piété, sa grâce et sa pudeur ;

X

Alors ces nobles mains, qui, du travail lassées,
Ne prenaient de repos que le temps de prier,
Ces mains riches d’aumône et pleines de pensées
Ces mains où tant de pleurs sont venus s’essuyer,
Frissonnent tout à coup et retombent glacées.
Le cercueil est à Pise ; on va nous l’envoyer.