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t’agenouilles au pied de ton lit ; mais tu comprends bien que tu pries, et c’est tout ce qu’il faut à Dieu.

Rosette

Comme vous me parlez, monseigneur !

Perdican

Tu ne sais pas lire ; mais tu sais ce que disent ces bois et ces prairies, ces tièdes rivières, ces beaux champs couverts de moissons, toute cette nature splendide de jeunesse. Tu reconnais tous ces milliers de frères, et moi pour l’un d’entre eux ; lève-toi, tu seras ma femme et nous prendrons racine ensemble dans la sève du monde tout-puissant.

(Il sort avec Rosette.)



Scène IV.

Entre Le Chœur.

Il se passe assurément quelque chose d’étrange au château ; Camille a refusé d’épouser Perdican ; elle doit retourner aujourd’hui au couvent dont elle est venue. Mais je crois que le seigneur son cousin s’est consolé avec Rosette. Hélas ! la pauvre fille ne sait pas quel danger elle court en écoutant les discours d’un jeune et galant seigneur.

Dame Pluche, entrant.

Vite, vite, qu’on selle mon âne !

Le Chœur

Passerez-vous comme un songe léger, ô vénérable dame ? Allez-vous si promptement enfourcher derechef cette pauvre bête qui est si triste de vous porter ?

Dame Pluche

Dieu merci, chère canaille, je ne mourrai pas ici.

Le Chœur

Mourez au loin, Pluche, ma mie ; mourez inconnue dans un caveau malsain. Nous ferons des vœux pour votre respectable résurrection.

Dame Pluche

Voici ma maîtresse qui s’avance. (À Camille qui entre.) Chère Camille, tout est prêt pour notre départ ; le baron a rendu ses comptes, et mon âne est bâté.

Camille

Allez au diable, vous et votre âne ; je ne partirai pas aujourd’hui.

(Elle sort.)
Le Chœur

Que veut dire ceci ? Dame Pluche est pâle de