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Scène III.

(Le petit bois.)
Entrent Camille et Le Paysan.
Le Paysan

Mademoiselle, je vais au château porter une lettre pour vous ; faut-il que je vous la donne, ou que je la remette à la cuisine, comme me l’a dit le seigneur Perdican ?

Camille

Donne-la-moi.

Le Paysan

Si vous aimez mieux que je la porte au château, ce n’est pas la peine de m’attarder.

Camille

Je te dis de me la donner.

Le Paysan

Ce qui vous plaira. (Il donne la lettre.)

Camille

Tiens, voilà pour ta peine.

Le Paysan

Grand merci ; je m’en vais, n’est-ce pas ?

Camille

Si tu veux.

Le Paysan

Je m’en vais, je m’en vais.

(Il sort.)
Camille, lisant.

Perdican me demande de lui dire adieu, avant de partir, près de la petite fontaine où je l’ai fait venir hier. Que peut-il avoir à me dire ? Voilà justement la fontaine, et je suis toute portée. Dois-je accorder ce second rendez-vous ? Ah ! (Elle se cache derrière un arbre.) Voilà Perdican qui approche avec Rosette, ma sœur de lait. Je suppose qu’il va la quitter ; je suis bien aise de ne pas avoir l’air d’arriver la première.

(Entrent Perdican et Rosette, qui s’assoient.)
Camille, cachée, à part.

Que veut dire cela ? Il la fait asseoir près de lui ? Me demande-t-il un rendez-vous pour y venir causer avec une autre ? Je suis curieuse de savoir ce qu’il lui dit.

Perdican, à haute voix, de manière que Camille l’entende.

Je t’aime, Rosette ! toi seule au monde tu n’as rien oublié de nos beaux jours passés ; toi seule tu te souviens de la vie qui