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réglé notre désordre, je ne laissais pas d’aller dans le monde. La vue des femmes m’y causait un trouble insupportable ; je ne leur touchais la main qu’en tremblant. Mon parti était pris de n’aimer plus jamais.

Cependant je revins un certain soir d’un bal avec le cœur si malade, que je sentis que c’était de l’amour. Je m’étais trouvé à souper auprès d’une femme, la plus charmante et la plus distinguée dont le souvenir me soit resté. Lorsque je fermai les yeux pour m’endormir, je la vis devant moi. Je me crus perdu ; je résolus aussitôt de ne plus la rencontrer, d’éviter tous les endroits où je savais qu’elle allait. Cette sorte de fièvre dura quinze jours, pendant lesquels je restai presque constamment étendu sur mon canapé, et me rappelant sans fin, malgré moi, jusqu’aux moindres mots que j’avais échangés avec elle.

Comme il n’y a pas d’endroit sous le ciel où