Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. I, 1836.djvu/181

Cette page n’a pas encore été corrigée

la seule que j’eusse aimée, celle que je voulais pleurer jusqu’à la mort, devenue tout à coup une éhontée sans vergogne, le sujet des quolibets des jeunes gens, d’un blâme et d’un scandale universels ! Il me semblait que je sentais sur mon épaule l’impression d’un fer rouge, et que j’étais marqué d’un stigmate brûlant.

Plus je réfléchissais, plus je sentais la nuit s’épaissir autour de moi. De temps en temps je détournais la tête, et j’entrevoyais un sourire glacial, ou un regard curieux qui m’observait. Desgenais ne me quittait pas ; il comprenait bien ce qu’il faisait ; nous nous connaissions de longue main ; il savait bien que j’étais capable de toutes les folies, et que l’exaltation de mon caractère pouvait m’entraîner au-delà de toutes les bornes sur quelque route que ce fût, excepté sur une seule. Voilà pourquoi il déshonorait ma souffrance, et en appelait de ma tête à mon cœur.