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à-dire la famille civilisée. Et maintenant voilà cette pauvre fille qui fait un enfant ; voilà ses cheveux, son beau sein, son corps qui se flétrissent ; voilà qu’elle a perdu la beauté des amantes, et elle n’a point aimé ! Voilà qu’elle a conçu, voilà qu’elle a enfanté, et elle se demande pourquoi ; on lui apporte un enfant et on lui dit : Vous êtes mère. Elle répond : Je ne suis pas mère ; qu’on donne cet enfant à une femme qui ait du lait ; il n’y en a pas dans mes mamelles. Ce n’est pas ainsi que le lait vient aux femmes. Son mari lui répond qu’elle a raison, que son enfant le dégoûterait d’elle. On vient, on la pare, on met une dentelle de Malines sur son lit ensanglanté ; on la soigne, on la guérit du mal de la maternité. Un mois après, la voilà aux Tuileries, au bal, à l’Opéra ; son enfant est à Chaillot, à Auxerre ; son mari au mauvais lieu. Dix jeunes gens lui parlent d’amour, de dévouement, de sympathie, d’éternel embrassement,