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car il avait passé la moitié de sa vie à la baiser sur son front candide en lui apprenant à chanter les psaumes de David et les cantiques de Saül ; car il n’avait qu’elle sur terre ; et cependant Dieu l’a consolé.

Croyez-moi, lorsque, dans vos détresses, vous penserez à Abeilard, vous ne verrez pas du même œil les doux blasphèmes du vieux Voltaire et les badinages de Courier ; vous sentirez que la raison humaine peut guérir les illusions, mais non pas guérir les souffrances ; que Dieu l’a faite bonne ménagère, mais non pas sœur de charité. Vous trouverez que le cœur de l’homme, quand il a dit : Je ne crois à rien, car je ne vois rien, n’avait pas dit son dernier mot. Vous chercherez autour de vous quelque chose comme une espérance ; vous irez secouer les portes des églises pour voir si elles branlent encore ; mais vous les trouverez murées ; vous penserez à vous faire trappiste, et la destinée qui vous raille vous répondra par une bouteille de vin du peuple et une courtisane.

Et si vous buvez la bouteille, si vous prenez la courtisane et l’emmenez dans votre lit, sachez comme il en peut advenir.