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parlera de Dalens ? » car Larive ne m’avait rien dit que ce que peut dire un valet. Par qui le savait-il ? par quelque servante ou quelque paysan. Il me fallait un témoin qui pût avoir vu Dalens chez madame Pierson, et qui sût à quoi s’en tenir. Ce Dalens ne me sortait pas de la tête, et, ne pouvant parler d’autre chose, j’en parlai tout de suite à Mercanson.

Si Mercanson était un méchant homme, s’il était niais ou rusé, je ne l’ai jamais distingué clairement ; il est certain qu’il devait me haïr, et qu’il en agit avec moi aussi méchamment que possible. Madame Pierson, qui avait la plus grande amitié pour le curé (et c’était à juste titre), avait fini, presque malgré elle, par en avoir pour le neveu. Il en était fier, par conséquent jaloux. Il n’y a pas que l’amour seul qui donne de la jalousie ; une faveur, un mot bienveillant, un sourire d’une belle bouche, peuvent l’inspirer jusqu’à la rage à certaines gens.

Mercanson parut d’abord étonné, aussi bien que Larive, des questions que je lui adressais. J’en étais moi-même plus étonné encore. Mais qui se connaît ici-bas ?

Aux premières réponses du prêtre, je le vis comprendre ce que je voulais savoir, et décidé à ne pas me le dire.

« Comment se fait-il, monsieur, que vous qui connaissez madame Pierson depuis longtemps, et qui êtes reçu chez elle d’une façon assez intime (je le pense du moins), vous n’y ayez point rencontré M. de Dalens ? Mais apparemment vous avez quelque raison, qu’il ne m’appartient point de connaître, pour vous enquérir de lui aujourd’hui. Ce que j’en puis dire pour ma part, c’est que c’était un honnête gentilhomme, plein de bonté et de charité ; il était, comme vous, monsieur, fort