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Vainement j’écartai ces idées ; elles mirent un instant mon imagination en débauche. Je voyais déjà la comtesse nue, dans les bras d’une autre femme, les cheveux épars, pantelante, abattue, et que tourmente encore un plaisir avorté.

Mon sang était en feu, mes sens grondaient, je tombai comme étourdi sur un sopha.

Revenu de cette émotion, je calculai froidement ce que j’avais à faire pour surprendre la comtesse : il le fallait à tout prix.

Je me décidai à l’observer pendant la nuit, à me cacher dans sa chambre à coucher. La porte vitrée d’un cabinet de toilette faisait face au lit. Je compris tout l’avantage de cette position ; et, me dérobant à l’aide de quelques robes suspendues, je me résignai patiemment à attendre l’heure du sabbat.

J’étais à peine blotti, que la comtesse parut, appelant sa camériste, jeune fille au teint brun, aux formes accusées : « Julie, je me passerai de vous ce soir. Couchez-vous. Ah ! si vous entendez du bruit dans ma chambre