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blondin de seize ans, et la couronne qu’il lui posa sur la tête descendit jusqu’aux épaules.

Un prix est peu de chose si l’on s’en tient aux succès de collège. Les ouvrages d’Alfred de Musset prouvent qu’il ne s’arrêta pas sitôt dans l’étude de la philosophie, et qu’il poussa très loin son éducation métaphysique. Pour quiconque a pris la peine de le lire, le penseur est toujours à la hauteur du poète[1]. Ce qu’il importe de remarquer, puisqu’il s’agit ici de faire connaître l’homme, c’est sa manière de procéder à la recherche du vrai. Lorsqu’il se mesurait avec un grand esprit, il commençait par remplir en conscience le rôle de disciple, afin de se bien pénétrer de la doctrine ou du système. Non content d’étudier une philosophie, il l’adoptait ; volontiers il l’aurait professée et même pratiquée. Mais bientôt sa raison se trouvait heurtée sur un point ; le doute arrivait ; le disciple devenait juge, et puis contradicteur. Je le vis ainsi passer tour à tour de Descartes à Spinosa, puis aux philosophes modernes par Cabanis et Maine de Biran, pour venir aborder au port où il trouva l’Espoir en Dieu. À la recherche du beau, il procéda de la même façon, commençant par jouir de tout ce qui lui plai-

  1. M. Victor de Laprade, dans son discours de réception à l’Académie française, en prononçant l’éloge d’Alfred de Musset, qu’il avait l’insigne honneur de remplacer, a laissé échapper, par mégarde ou par légèreté, ce mot étrange : « Alfred de Musset obtint, le croirait-on ? un grand prix de philosophie ! » S’il y a là quelque chose d’incroyable, c’est l’étonnement de M. Victor de Laprade.