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laire, c’était un grand sujet d’émotion que le changement de professeur ; pour en suivre un qui lui témoignait de l’intérêt, il sauta de la classe de sixième à celle de quatrième, ce qui ne l’empêcha pas d’enlever un premier prix à la fin de l’année. Plus tard, il se corrigea bien de cette timidité ; mais il ne put jamais se défaire de sa disposition à l’inquiétude.

Aux vacances de l’année 1822, notre père eut l’envie de nous mener chez ses vieux amis du Vendômois, dont la plupart nous étaient inconnus. À Chartres on nous avait préparé une réception burlesque. En descendant de la diligence, nous tombons dans un groupe de paysans qui paraissent fort ébahis de rencontrer par hasard Monsieur de Pathay. On lui demande si les deux gas qui l’accompagnent ne seraient point ses fils, et on nous adresse des quolibets que nous ne savions comment prendre. Cependant Monsieur de Pathay, plus fin que Pourceaugnac, reconnaît, l’un après l’autre, tous ses mystificateurs, hormis une nourrice fort bavarde et maligne comme un démon. C’était une femme qu’il avait laissée jeune fille et qu’il retrouvait mère de famille à douze ans d’intervalle. Nous regardions avec étonnement cette compagnie égrillarde ; mais comme chacun joua son rôle à merveille, nous conservâmes une haute opinion de l’esprit et de la gaieté des habitants de Chartres.

À Vendôme nous attendait une réception moins divertissante. Quoique le jour et l’heure de notre ar-