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avis et les ordonnances se passaient en conversations. « Nous l’obligerons à se soigner, reprit M. Empis, et voici comment : je le ferai inviter à venir au château de Saint-Cloud ; quand il y sera, il faudra bien qu’il obéisse au médecin de la maison, et M. R… le guérira. »

Je ne doutai pas que cette petite conspiration ne dût réussir. Une fois à Saint-Cloud, Alfred se serait laissé faire. En attendant le retour de la saison favorable à l’accomplissement de ce projet, je fis un voyage de quelques jours à Angers. Pendant mon absence, Alfred reçut une invitation à dîner au Palais-Royal, chez le prince Napoléon. Quoique très souffrant, il voulut y aller. Sa toilette, qui lui donnait beaucoup de fatigue, le mit en retard. Lorsqu’il arriva, on était à table. Après le dîner, voulant réparer le fâcheux effet de son entrée, il s’approcha du prince, se mêla à la conversation, la prit au point où elle était, la dirigea et la rendit tour à tour sérieuse, gaie, intéressante. Il n’y a pas encore bien longtemps de cela ; plusieurs des personnes qui étaient présentes se souviennent de cette soirée ; elles m’ont dit que jamais Alfred de Musset ne leur avait paru plus aimable et plus animé. Ce fut sa dernière sortie. En rentrant chez lui, il se mit au lit et ne s’en releva plus.

J’étais encore à Angers, le 26 avril, lorsque je reçus une lettre de la gouvernante qui m’engageait à