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exécution de la pièce que de son propre succès, et tenant tête au public de Londres, le jour même de son premier début. Il voyait dans ces prémices tout l’avenir d’une seconde Malibran.

Rachel, dont il ne manquait pas une représentation, ne l’intéressait pas moins. Un soir du mois de mai, il la rencontra dans les galeries du Palais-Royal, en sortant du Théâtre-Français. Elle l’emmena souper avec une bande d’amis et d’artistes. On peut lire dans les Œuvres posthumes la curieuse relation de ce souper ; c’est à la fois, comme le dit l’auteur, un tableau de Rembrandt et un chapitre de Wilhelm Meister. Bientôt après, les ouvrages d’Augustin Thierry et de Sismondi s’entassèrent sur sa table ; il composait le plan de la Servante du roi. J’ai dit ailleurs pourquoi cette tragédie ne fut jamais achevée ; mais, au moment où il en écrivait le quatrième acte (juillet 1839), rien de pouvait faire croire que ce beau projet dût avorter. Rachel lut le monologue de Frédégonde et, sur cet échantillon, demanda le reste de la pièce. Tandis que le poète y rêvait, ses amis et surtout le directeur de la Revue lui reprochaient son silence. Quoique la paresse n’y fût pour rien, ce long silence était préjudiciable à ses intérêts.

On sait qu’il n’appartient qu’aux éditeurs anglais de payer grandement la marchandise littéraire d’une qualité supérieure. Dans les publications françaises, il n’en est point ainsi. Rien ne supplée à la quantité ;