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lui le fatal penchant à aimer la douleur, qu’il a reproché à la grande cantatrice dans le moment où il écrivit ce vers célèbre :


Tu regardais aussi la Malibran mourir.


Car il en aurait pu dire autant de lui-même vingt ans plus tard.

L’année 1836 s’acheva au milieu de la rumeur causée par l’attentat de Meunier. C’était la quatrième fois que le roi échappait à la mort. Alfred, qui n’oubliait pas l’hospitalité qu’il avait reçue à Neuilly, partagea l’émotion générale. Il écrivit pour son propre soulagement un sonnet qu’il ne songeait point à publier, mais dont son ami Tattet lui demanda une copie. Tattet communiqua cette copie à M. Édouard Bocher, qui la remit à son frère Gabriel, bibliothécaire du duc d’Orléans ; et les vers sur l’attentat de Meunier arrivèrent par ce chemin jusqu’au prince royal. Un exprès du château apporta le billet suivant à l’auteur :


« Notre ami commun, M. Bocher, vient de me faire lire, mon cher condisciple, une belle page qu’il a dérobée à votre portefeuille poétique. Ces vers vraiment beaux et où l’aridité et l’ingratitude du sujet disparaissent devant l’élévation de la pensée et la noble simplicité de l’expression, m’eussent touché, quand même ils auraient été l’œuvre d’un inconnu ;