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II


Malgré toutes les questions, toutes les instances que put faire Armand, Tristan ne voulut donner à son frère aucune explication des étranges paroles qu’il avait prononcées en rentrant. Le lendemain, il annonça à sa mère que ses affaires le forçaient d’aller à Paris pour quelques jours, et donna ses ordres en conséquence ; il avait le dessein de partir le soir même.

— Il faut convenir, disait Armand, que tu en agis avec moi d’une façon un peu cavalière. Tu me fais la moitié d’une confidence, et tu t’en vas d’un jour à l’autre avec le reste de ton secret. Que veux-tu que je pense de ce départ impromptu ?

— Ce qu’il te plaira, répondit Tristan avec une indifférence si tranquille qu’elle semblait n’avoir rien d’emprunté, tu ne feras qu’y perdre ta peine. J’ai eu un mouvement de colère, il est vrai, pour une bagatelle, une querelle d’amour-propre, une bouderie, comme tu voudras l’appeler. La Bretonnière m’a ennuyé ; la marquise était de mauvaise humeur ; l’orage m’a contrarié ; je suis revenu je ne sais pourquoi, et je t’ai parlé sans savoir ce que je disais. Je conviendrai