Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Nouvelles et Contes I.djvu/268

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Ce serait une grande imprudence, répondit Pippo, si elle venait en plein jour ; mes domestiques ne pourraient manquer de la voir. Lui est-il possible de venir la nuit ?

— Non ; qui l’oserait à sa place ? Elle ne peut ni sortir la nuit, ni vous recevoir chez elle.

— Il faut donc qu’elle consente à venir autre part qu’ici, dans un endroit que je t’indiquerai.

— Non, c’est ici qu’elle veut venir ; voyez à prendre vos précautions.

Pippo réfléchit quelques instants. — Ta maîtresse peut-elle se lever de bonne heure ? demanda-t-il à la négresse.

— À l’heure où se lève le soleil.

— Eh bien ! écoute. Je me réveille ordinairement fort tard, par conséquent toute ma maison dort la grasse matinée. Si ta maîtresse peut venir au point du jour, je l’attendrai, et elle pourra pénétrer ici sans être vue de personne. Pour ce qui est de la faire sortir ensuite, je m’en charge, si toutefois elle peut rester chez moi jusqu’à la nuit tombante.

— Elle le fera ; vous plaît-il que ce soit demain ?

— Demain à l’aurore, dit Pippo. Il glissa une poignée de sequins sous la gorgerette de la messagère ; puis, sans en demander davantage, il regagna sa chambre et s’y enferma, décidé à veiller jusqu’au jour. Il se fit d’abord déshabiller, afin qu’on crût qu’il allait se mettre au lit ; lorsqu’il fut seul, il alluma un bon feu, mit une