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d’horreur. La main qu’il tenait était glacée et un corps inanimé venait de rouler à ses pieds.

Épouvanté, il appela au secours. Gérard entrait, suivi d’un médecin. On ouvrit la fenêtre ; on porta Bernerette sur son lit. Le médecin l’examina, secoua la tête, et donna des ordres. Les symptômes n’étaient pas douteux, la pauvre fille avait pris du poison ; mais quel poison ? Le médecin l’ignorait, et cherchait en vain à le deviner. Il commença par saigner la malade ; Frédéric la soutenait dans ses bras ; elle ouvrit les yeux, le reconnut et l’embrassa, puis elle retomba dans sa léthargie. Le soir, on lui fit prendre une tasse de café ; elle revint à elle comme si elle se fût éveillée d’un songe. On lui demanda alors quel était le poison dont elle s’était servie ; elle refusa d’abord de le dire ; mais, pressée par le médecin, elle l’avoua. Un flambeau de cuivre, placé sur la cheminée, portait les marques de plusieurs coups de lime ; elle avait eu recours à cet affreux moyen pour augmenter l’effet d’une faible dose d’opium, le pharmacien auquel elle s’était adressée ayant refusé d’en donner davantage.