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prêter elle-même, elle lui dit sa ressource, l’encourage, lui cite des exemples, la mène chez le marchand, lui fait une petite clientèle ; trois mois après, l’amie est à son aise et rend à une autre le même service. Ces sortes de choses se passent tous les jours ; personne n’en sait rien, et c’est pour le mieux ; car les bavards qui rougissent du travail trouveraient bientôt le moyen de déshonorer ce qu’il y a au monde de plus honorable.

— Combien de temps, demanda Valentin, faut-il à peu près pour faire un coussin comme celui dont je vous parle, et combien gagne l’ouvrière ?

— Monsieur, répondit le garçon, pour faire un coussin comme celui-là, il faut deux mois, six semaines environ. L’ouvrière paye sa laine, bien entendu ; par conséquent, c’est autant de moins pour elle. La laine anglaise, belle, coûte dix francs la livre ; le ponceau, le cerise, coûtent quinze francs. Pour ce coussin, il faut une livre et demie de laine au plus, et il sera payé quarante ou cinquante francs à l’habile ouvrière.