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poser ? me croyez-vous si dépourvu de sens ? mon étourderie ou ma déraison a-t-elle donc été si loin, que de vous faire douter de mon respect ? Vous qui me disiez tantôt que vous aviez quelque plaisir à me voir, peut-être quelque amitié pour moi (n’est-il pas vrai, marquise ?), pouvez-vous penser qu’un homme ainsi distingué par vous, que vous avez pu trouver digne d’une si précieuse, d’une si douce indulgence, ne saurait pas ce que vous valez ? Suis-je donc aveugle ou insensé ? Vous, ma maîtresse ! non pas, mais ma femme !

La marquise.

Ah ! — Eh bien ! si vous m’aviez dit cela en arrivant, nous ne nous serions pas disputés. — Ainsi, vous voulez m’épouser ?

Le comte.

Mais certainement, j’en meurs d’envie, je n’ai jamais osé vous le dire, mais je ne pense pas à autre chose depuis un an ; je donnerais mon sang pour qu’il me fût permis d’avoir la plus légère espérance…

La marquise.

Attendez donc, vous êtes plus riche que moi.

Le comte.

Oh, mon Dieu ! je ne crois pas, et qu’est-ce que cela vous fait ? Je vous en supplie, ne parlons pas de ces choses-là ! Votre sourire, en ce moment, me fait frémir d’espoir et de crainte. Un mot, par grâce ! ma vie est dans vos mains.