quelque chagrin secret qu’elle dissimule, je ne sais trop, mais j’ai le projet, si cela se peut, de la marier, et de la mener à la cour, afin d’essayer de la distraire ; car elle vit dans la solitude, et vous savez de quel danger cela est pour une jeune tête qui s’exalte, se nourrit de désirs, d’illusions ; [qui prend pour l’espérance tout ce qu’elle entrevoit, pour l’avenir tout ce qu’elle ne peut voir ; qui s’attache à un rêve dont elle se fait un monde, innocemment, sans y réfléchir, par un penchant naturel du cœur,] et qui, hélas ! en cherchant l’impossible, passe bien souvent à côté du bonheur.
Cela est cruel.
Plus qu’on ne peut dire.] Combien j’en ai vu, des plus belles, des plus nobles et des plus sages, perdre leur jeunesse, et quelquefois la vie, pour avoir gardé de pareils secrets !
On peut donc en mourir, madame ?
Oui, on le peut, et ceux qui le nient ou qui s’en raillent, n’ont jamais su ce que c’est que l’amour, [ni en rêve ni autrement. Un homme, sans doute, doit s’en défendre. La réflexion, le courage, la force, l’habitude de l’activité, le métier des armes surtout, doivent le sauver ; mais une femme ! — Privée de ce qu’elle aime, où est son soutien ? Si elle a du courage, où est