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Marie.

N’en parlons pas, Catherine ; — il est assez cruel pour une mère de ne pouvoir parler de son fils.

Catherine.

Ah ! cette Florence ! c’est là qu’on l’a perdu. N’ai-je vu briller quelquefois dans ses yeux le feu d’une noble ambition ? Sa jeunesse n’a-t-elle pas été l’aurore d’un soleil levant ? Et souvent encore aujourd’hui il me semble qu’un éclair rapide… — Je me dis malgré moi que tout n’est pas mort en lui.

Marie.

Ah ! tout cela est un abîme ! Tant de facilité, un si doux amour de la solitude ! Ce ne sera jamais un guerrier que mon Renzo, disais-je en le voyant rentrer de son collège, tout baigné de sueur, avec ses gros livres sous le bras ; mais un saint amour de la vérité brillait sur ses lèvres et dans ses yeux noirs. Il lui fallait s’inquiéter de tout, dire sans cesse : « Celui-là est pauvre, celui-là est ruiné ; comment faire ? » Et cette admiration pour les grands hommes de son Plutarque ! Catherine, Catherine, que de fois je l’ai baisé au front, en pensant au père de la patrie !

Catherine.

Ne vous affligez pas.

Marie.

Je dis que je ne veux pas parler de lui, et j’en parle sans cesse. Il y a de certaines choses, vois-tu, les mères