Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies II.djvu/341

Cette page a été validée par deux contributeurs.

jamais pensé depuis sans que le féminin sourire vînt me chatouiller le coin des lèvres, et j’ai juré que jamais femme au monde ne me ganterait de ces gants-là.

Van Buck.

C’est-à-dire qu’en franc libertin, tu doutes de la vertu des femmes, et que tu as peur que les autres te rendent le mal que tu leur as fait.

Valentin.

Vous l’avez dit : j’ai peur du diable, et je ne veux pas être ganté.

Van Buck.

Bah ! c’est une idée de jeune homme.

Valentin.

Comme il vous plaira ; c’est la mienne ; dans une trentaine d’années, si j’y suis, ce sera une idée de vieillard, car je ne me marierai jamais.

Van Buck.

Prétends-tu que toutes les femmes soient fausses, et que tous les maris soient trompés ?

Valentin.

Je ne prétends rien, et je n’en sais rien. Je prétends, quand je vais dans la rue, ne pas me jeter sous les roues des voitures ; quand je dîne, ne pas manger de merlan ; quand j’ai soif, ne pas boire dans un verre cassé, et quand je vois une femme, ne pas l’épouser ; et encore je ne suis pas sûr de n’être ni écrasé, ni étranglé, ni brèche-dent, ni…