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peut-il te faire que Jacqueline ait un amant ? C’est quelque officier de la garnison.

Fortunio.

J’aurais voulu être dans l’étude ; j’aurais voulu voir tout cela.

Guillaume.

Dieu soit béni ! c’est notre libraire qui t’empoisonne avec ses romans. Que te revient-il de ce conte ? D’être Gros-Jean comme devant. N’espères-tu pas, par hasard, que tu pourras avoir ton tour ? Eh ! oui, sans doute, monsieur se figure qu’on pensera quelque jour à lui. Pauvre garçon ! tu ne connais guère nos belles dames de province. Nous autres, avec nos habits noirs, nous ne sommes que du fretin, bon tout au plus pour les couturières. Elles ne tâtent que du pantalon rouge4, et une fois qu’elles y ont mordu, qu’importe que la garnison change ? Tous les militaires se ressemblent ; qui en aime un en aime cent. Il n’y a que le revers de l’habit qui change, et qui de jaune devient vert ou blanc. Du reste, ne retrouvent-elles pas la moustache retroussée de même, la même allure de corps de garde, le même langage et le même plaisir ? Ils sont tous faits sur un modèle ; à la rigueur, elles peuvent s’y tromper.

Fortunio.

Il n’y a pas à causer avec toi : tu passes tes fêtes et dimanches à regarder des joueurs de boule.

Guillaume.

Et toi, tout seul à ta fenêtre, le nez fourré dans tes