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Philippe.

Que t’importe qu’il vive ? ta vengeance n’en est que plus complète.

Pierre.

Oui, je le sais bien, voilà comme vous voyez les choses. Tenez, mon père, vous êtes bon patriote, mais encore meilleur père de famille : ne vous mêlez pas de tout cela.

Philippe.

Qu’as-tu encore en tête ? Ne saurais-tu vivre un quart d’heure sans penser à mal ?

Pierre.

Non, par l’enfer ! je ne saurais vivre un quart d’heure tranquille dans cet air empoisonné. Le ciel me pèse sur la tête comme une voûte de prison, et il me semble que je respire dans les rues des quolibets et des hoquets d’ivrognes. Adieu, j’ai affaire à présent.

Philippe.

Où vas-tu ?

Pierre.

Pourquoi voulez-vous le savoir ? Je vais chez les Pazzi.

Philippe.

Attends-moi donc, car j’y vais aussi.

Pierre.

Pas à présent, mon père ; ce n’est pas un bon moment pour vous.