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Césario.

Eh bien ! oui, c’est un homme de génie ; qu’il nous laisse tranquilles. As-tu vu le tableau de Pontormo ?

Lionel.

Et j’y ai vu le siècle tout entier ; un homme incertain entre mille chemins divers, la caricature des grands maîtres ; se noyant dans son propre enthousiasme, capable de se retenir, pour s’en tirer, au manteau gothique d’Albert Dürer.

Césario.

Vive le gothique ! Si les arts se meurent, l’antiquité ne rajeunira rien. Tra deri da ! Il nous faut du nouveau.

André del Sarto, entrant et parlant à un valet.

Dites à Grémio de seller deux chevaux, un pour lui et un pour moi. Nous allons à la ferme.

Césario, continuant.

Du nouveau à tout prix, du nouveau ! Eh bien ! maître, quoi de nouveau ce matin ?

André.

Toujours gai, Césario ? Tout est nouveau aujourd’hui, mon enfant ; la verdure, le soleil et les fleurs, tout sera encore nouveau demain. Il n’y a que l’homme qui se fasse plus vieux, tout se fait plus jeune autour de lui chaque jour. Bonjour, Lionel ; levé de si bonne heure, mon vieil ami ?

Césario.

Alors les jeunes peintres ont donc raison de deman-