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« Il y a quelque chose de bon dans les plus mauvaises choses. »

Les gens qui connaissent l’Allemagne et qui ont approché, dans leurs voyages, quelques-uns des membres de ce cercle esthétique de Weimar, dont l’auteur de Werther était l’âme, savent qu’il a laissé après lui cette consolante et noble maxime.

Bien que, dans notre siècle, les livres ne soient guère que des objets de distraction, de pures superfluités, où l’agréable, ce bouffon suranné, oublie innocemment son confrère l’utile, il me semble que si je me trouvais chargé, pour une production quelconque, du difficile métier de critique, au moment où je poserais le livre pour prendre la plume, la figure vénérable de Goethe m’apparaîtrait avec sa dignité homérique et son antique bonhomie. En effet, tout homme qui écrit un livre est mû par trois raisons : premièrement, l’amour-propre, autrement dit, le désir de la gloire ; secondement, le besoin de s’occuper, et, en troisième lieu, l’intérêt pécuniaire. Selon l’âge et les circonstances, ces trois mobiles varient et prennent dans l’esprit de l’auteur la première ou la dernière place ; mais ils n’en subsistent pas moins.

Si le désir de la gloire est le premier mobile d’un artiste, c’est un noble désir, qui ne trouve place que dans une noble organisation. Malgré tous les ridicules qu’on peut trouver à la vanité, et malgré la sentence du Misanthrope de Molière, qui fait remarquer

Comme, dans notre temps,
Cette soif a gâté de fort honnêtes gens ;

malgré tout ce qu’on peut dire de fin et de caustique sur la nécessité de rimer, et sur le « qui diantre vous pousse à