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chose[, et qu’avant de jeter au vent la poussière de sa fleur chérie, il faut que le calice en soit baigné de larmes, épanoui par quelques rayons du soleil, entr’ouvert par une main délicate] ? Tout cela n’est-il pas un rêve, une bulle de savon qui, au premier soupir d’un cavalier à la mode, doit s’évaporer dans les airs ?

Octave.

Vous vous méprenez sur mon compte et sur celui de Cœlio.

Marianne.

Qu’est-ce après tout qu’une femme ? L’occupation d’un moment, une coupe fragile qui renferme une goutte de rosée, qu’on porte à ses lèvres et qu’on jette par-dessus son épaule. Une femme ! c’est une partie de plaisir ! Ne pourrait-on pas dire, quand on en rencontre une : Voilà une belle nuit qui passe ? Et ne serait-ce pas un grand écolier en de telles matières, que celui qui baisserait les yeux devant elle, qui se dirait tout bas : « Voilà peut-être le bonheur d’une vie entière, » et qui la laisserait passer ?

Elle sort.
Octave, seul.

Tra, tra, poum, poum ! tra deri la la ! Quelle drôle de petite femme ! Hai ! Holà !

Il frappe à une auberge.

Apportez-moi ici, sous cette tonnelle, une bouteille de quelque chose.