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jourd’hui n’est que trop vraie : on vous vend au prince d’Eysenach. Quelle fête ! votre orgueilleux tuteur n’en mourra-t-il pas de joie ? Lâche et vil courtisan !

Laurette.

Je vous en supplie, Razetta, n’élevez pas la voix ; ma gouvernante est dans la salle voisine ; on m’attend, je ne puis que vous dire adieu.

Razetta.

Adieu pour toujours ?

Laurette.

Pour toujours !

Razetta.

Je suis assez riche pour vous suivre en Allemagne.

Laurette.

Vous ne devez pas le faire. Ne nous opposons pas, mon ami, à la volonté du ciel.

Razetta.

La volonté du ciel écoutera celle de l’homme. Bien que j’aie perdu au jeu la moitié de mon bien, je vous répète que j’en ai assez pour vous suivre, et que j’y suis déterminé.

Laurette.

Vous nous perdrez tous deux par cette action.

Razetta.

La générosité n’est plus de mode sur cette terre.

Laurette.

Je le vois ; vous êtes au désespoir.