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Alfred de Musset était d’une taille moyenne, élégant dans ses formes, avec des manières de véritable gentilhomme. Il avait une chevelure blonde, naturellement bouclée et très abondante, le teint d’une fraîcheur rare, le nez aquilin, les yeux bleus, le regard ferme, la bouche expressive. Jusqu’à son dernier jour, il eut « le mois de mai sur les joues » comme Fantasio, et parut plus jeune qu’il ne l’était réellement[1]. Dans la conversation, il était ordinairement gai, volontiers rieur ; il savait surtout faire causer les autres. Sa parole donnait la vie aux sujets les plus simples ; jamais on n’y sentait une ombre de prétention, et souvent on ne s’apercevait de la profondeur de ses pensées qu’en y rêvant après son départ. Avec les femmes, son esprit était inépuisable. Il aimait particulièrement la compagnie des jeunes filles et prenait un plaisir extrême à se mettre à leur portée pour les divertir. Ses dispositions naturelles pour tous les arts étaient telles que, si la poésie n’eût pas été sa vocation la plus impérieuse, il se serait probablement fait connaître de quelque autre manière. Sa famille et ses amis ont conservé des dessins de lui, parmi lesquels on en trouve de très remarquables. En 1842, pendant un mois qu’il passa au château de Lorrey, dans la vallée de l’Eure, chez son excellent ami et cousin Adolphe de Musset, il couvrit de dessins deux albums ; ce sont, pour la plupart, des caricatures d’une ressemblance frappante ; plusieurs ont été faites de mémoire, avec une hardiesse et une li-

  1. Sur le portrait que Charles Landelle a fait de lui, deux ans avant sa mort, on lui donnerait à peine trente ans. Nous recommandons ce beau portrait à l’attention des personnes qui prétendent avoir vu le modèle et qui parlent de son visage ravagé.