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Mais qu’ont-ils, ces tourments, qui puisse épouvanter ?
Le lâche seul, seigneur, se laisse ainsi traiter.
Jusque sous le couteau s’attachant à la vie,
Il traîne dans le sang sa honteuse agonie,
Et, quand son pied meurtri sent le froid du tombeau,
Se rejette en pleurant dans les bras du bourreau.
Mais un cœur tout à soi, qui dédaigne de vivre,
Menacé du supplice, aisément s’en délivre.
Tout moyen peut servir ; mais il court au plus prompt :
Sur le fer qui l’enchaîne il peut briser son front ;
Le pavé des cachots, les murs qui l’environnent,
Tout recèle la mort ; qu’on les frappe, ils la donnent.
La mort, elle est partout, seigneur, elle est ici.
Qu’est-ce donc que la mort ?
Montrant son poignard.
Qu’est-ce donc que la mort ?Eh ! mon Dieu, la voici.

Le Roi.

Quel sera ton asile, et que prétends-tu faire ?

Frédégonde.

Galsuinde vous priait de la rendre à sa mère.
J’ai la mienne, seigneur, et je l’irai trouver.
Où commença ma vie, elle doit s’achever ;
Non pas au sein des cours, sur la couche dorée
Où gémit noblement une infante éplorée,
Ni sous le rideau vert des orangers en fleurs,
Invitant au sommeil de royales douleurs ;
Mais au bord des torrents, parmi les rocs arides,
Où sont encor debout les autels des druides ;