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EDWARD ELGAR

par ceux-là même à qui son but est le moins sympathique.

Il est manifeste que le tempérament d’Elgar a été touché profondément par le poème. Pour lui la composition du Songe de Gérontius est un acte de foi et on sent à chaque pas dans la partition sa conviction fervente. Toutes les ressources de l’art musical concourent à accroître la poignante du poème. La terreur angoissée de l’agonisant a pour contraste imposant l’accent solennel du prêtre qui murmure une prière au lit de mort. Un autre contraste frappant résulte du dialogue placide entre l’âme de Gérontius et son ange gardien interrompu, pendant leur envolée vers le tribunal suprême, par un chœur véhément de démons en furie. À ce passage succède le chœur des anges autour du trône de Dieu qu’une surélaboration de détails empêche seule d’atteindre à la sublimité, et l’œuvre finit dans une exquise sérénité par le chant de l’ange gardien au moment où l’âme rachetée est plongée dans l’onde du purgatoire.

Le Songe de Gérontius a apporté une sève nouvelle à la nature quelque peu épuisée de l’oratorio anglais. Son pittoresque plein de vie, sa puissance dramatique, son orchestration brillante et sonore ont résonné comme l’appel d’une trompette d’airain à des oreilles habituées à l’harmonie monotone de l’école de Mendelssohn qui avait dirigé presque seule la musique sacrée anglaise jusqu’à l’apparition d’Elgar.

Au Songe de Gérontius succédèrent The Apostles, les Apôtres (1903) et The Kingdom, le Royaume (1906), œu-