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GRANVILLE BANTOCK

rette à grand succès de ce temps. L’aventure était curieuse, en vérité, pour un jeune musicien destiné à parvenir au plus haut grade de son art ; mais, l’on peut expliquer la cause qui décida Bantock à accepter une besogne musicale en opposition si évidente avec son goût personnel et la qualité de sa science. En véritable enfant de l’art, il ne vit que la circonstance favorable pour visiter l’Orient lointain et contempler les scènes colorées d’or qui, depuis l’enfance, tenaient son jeune esprit éveillé. L’occasion était trop tentante pour ne pas la saisir à l’instant, et, faisant appel à tout son courage, il lut d’un trait la partition d’Une Demoiselle du Gaiety, s’engageant résigné à conduire durant une année entière valses et galops en échange de la réalisation de son rêve. J’imagine, toutefois, qu’à certains moments le musicien dut regretter sa décision rapide, lors même que les témoins colossaux de la fabuleuse splendeur de l’Inde, l’exotique et lumineuse beauté de la Chine et du Japon rachetaient dans son esprit les flonflons de l’orchestre d’opéra-bouffe et le bavardage railleur de divettes querelleuses. Mais, une juste récompense devait lui faire souvent oublier sa peine. Enfin s’ouvrait devant lui l’Orient enchanteur et ses yeux éblouis pouvaient se rassasier d’un spectacle radieusement pittoresque entrevu seulement jusque-là dans son imagination enfiévrée. Il avait aussi l’avantage appréciable d’acquérir sur place un souvenir foncièrement poétique qui, par la suite, devait être une aide précieuse à sa pratique musicale.