qui constituent une des plus sérieuses difficultés du passage. Ces rochers, comme nous l’avions remarqué dans notre reconnaissance préliminaire de la montagne, étaient flanqués de chaque côté par d’étroits couloirs verglassés. Celui qui se trouvait à notre droite paraissait le plus facile, mais, malheureusement, le soleil chauffait déjà la Tête du Lion, et allait libérer de leurs liens glacés, qui seuls les retenaient à leurs places, les glaçons et les pierres : le résultat en serait une grêle incessante de débris qui descendraient le couloir en bourdonnant et en sifflant. Nous étions dès lors forcés de prendre la cheminée située du côté du Cervin et qui se trouvait encore à l’abri de la mousqueterie de la montagne. Burgener prend de nouveau la tête et le voici bientôt en face d’un travail peu ordinaire. La glace était nue et aussi dure que glace bien gelée peut l’être ; et de plus la pente en était extrêmement forte. Elle était même si mauvaise au dessus, qu’il s’arrêta et qu’il examina anxieusement les rochers du Cervin pour voir si nous ne pouvions pas nous échapper par là. Il était évident que nous y rencontrerions des difficultés prolongées, et finalement le problème du couloir restait entier. Une fois encore il se tourne maussadement vers le mur de glace, et, marches par marches, il nous taille une route. Le promontoire rocheux à notre droite, repoussant toujours les pentes vers le dehors, nous oblige à aller à gauche dans une sorte d’enfoncement semi-circulaire de la muraille. Soudain la taille des marches cesse. « Der Teufel », le Diable est apostrophé en termes à glacer l’âme et la moitié des saints du calendrier romain sont chargés à fond dans les plus vigoureux termes que la langue allemande puisse posséder, avec les plus sanglants reproches pour leur négligence criminelle envers le plus évident de leurs devoirs.
Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/93
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
47
LE COL DU LION