Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/395

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
305
DE L’ALPINISME

le vrai montagnard aimera l’attaquer sans avoir la connaissance exacte de la route, connaissance qui réduirait la course à une simple promenade de tant d’heures de durée ; il ne pourra donc pas éviter invariablement tous les risques.

En fait, bien peu des ascensions habituelles sont complètement à l’abri des chutes de glace et de rochers. La route elle-même de Chamonix au Mont Blanc passe à un endroit où la trace est quelquefois balayée par les pierres de l’Aiguille du Midi[1], et à un autre endroit où les avalanches de glace du Dôme du Goûter menacent, et quelquefois atteignent le voyageur[2]. Il n’y a vraiment aucune immunité certaine contre ce danger, et il est pourtant à désirer que le jeune montagnard apprenne les différents moyens par lesquels il pourra le plus convenablement lutter contre lui. Acquérir l’art d’attendre une pierre qui tombe, et, au moment critique, sortir de la ligne de tir est chose essentielle pour le rochassier. Obtenir les connaissances suffisantes pour juger où et quand on doit s’attendre aux avalanches de glace et de neige, est également nécessaire pour guider avec sécurité une caravane. Il faudra pour cela les meilleures leçons des guides les plus anciens et les plus expérimentés, et combiner encore ces enseignements avec une longue expérience des neiges supérieures. Ceux qui aspirent à servir de guide à une caravane ne porteront jamais une trop grande attention à ce sujet ; ils doivent être capables de

  1. Le dernier en date des accidents de ce genre est celui qui contusionna, peu gravement il est vrai, le baron de Holzhausen, le 11 juillet 1895 (Revue Alpine, Lyon, 1895, p. 311). — M. P.
  2. Allusion à l’accident du 21 août 1891, dans lequel M. Kothe et le guide Simond perdirent la vie, ensevelis sous une avalanche du Dôme. Se reporter à l émouvant et pathétique récit de cette tourmente par M. F. Schrader, dans l’Annuaire du Club Alpin Français, 1895, p. 21-45 et spécialement p. 42. — M. P.