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LE DYCH TAU

jouir d’un sommeil rafraîchissant : Zurlluh, l’esprit tranquillisé de ce côté, se livre à une lutte acharnée avec le feu. Le bois de Bezingi demande toujours des égards, mais à 1 h. mat., il lasserait la patience d’un saint et l’habileté du plus expert des chauffeurs de sa Majesté Satan. Malheureusement le petit ruisseau, sur lequel nous avions compté pour nous fournir toujours de l’eau, se trouvait gelé jusqu’au cœur, et nous eûmes à employer l’ennuyeux procédé de la fonte de la glace. Mes bottes étaient gelées elles aussi et les chausser se trouva être la partie la plus ardue et la plus pénible de l’expédition. Pourtant, ces difficultés préliminaires eurent une fin et nous pûmes enfin jouir, sous l’abri réchauffant de la tente, d’une tasse de thé chaud accompagnée de biscuits.

Un peu après 2 h. 30 mat. nous commençons l’ascension et nous marchons sans nous arrêter sur la neige ferme en remontant vers le petit glacier. Nous le traversons et nous ascensionnons les pentes qui se dirigent vers le col par la voie que j’avais précédemment prise dans ma route au contrefort Sud-Ouest. Après avoir atteint celui-ci, nous tournons franchement à droite, et escaladant en écharpe une ou deux tours croulantes, nous nous lançons droit sur la face du pic. Nous remontons, tout en nous portant toujours sensiblement il droite, et nous atteignons un couloir peu profond, encore garni par places de masses de neige à moitié fondante. L’une d’elles frappée par le piolet de Zurfluh se détache en bloc et vient me toucher sévèrement à la tête, au genou et à la main. J’étais heureusement tout près de lui, malgré cela, pendant une minute ou deux, j’eus à peine conscience de ce qui venait de m’arriver. Si nous avions été trois ou quatre à la corde l’aventure n’eût pas manqué d’être