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L’AIGUILLE DU PLAN

ment à laquelle il ne fallait pas penser autrement. En dépit d’une marche minuscule, Hastings, avec experte habileté et grande force, me hisse sur ses épaules, et, de ce terrain aérien, je plante fortement le piton dans la fissure avec mon piolet. Avant que la corde puisse être passée dans le piton, il est naturellement nécessaire que je me détache, chose qui présente beaucoup de difficultés, spécialement quand on ne peut consacrer qu’une main au travail. Ces opérations durèrent bien à peu près cinq minutes, et ce fut avec un soupir de satisfaction que Hastings me hissa doucement en bas du rocher et frictionna délicatement les parties de son corps froissées par mes clous de soulier.

Nous nous apercevons alors que la corde ne glissera pas sur le piton quand on la rappellera, en sorte que, une fois encore, il nous faut avoir recours à la pyramide vivante, pour attacher au piton, comme anneau, un morceau de la corde dans lequel celle-ci puisse ensuite glisser facilement. Après ces travaux ardus, la traversée de la dalle est effectuée avec une facilité inattendue ; mais il est bien possible que, en l’absence de la protection de la corde, la prise à saisir eût alors semblé terriblement petite. En atteignant le faîte de la cheminée il m’est heureusement possible de toucher juste du piolet le mur opposé ; cet appui me permet de faire avec le pied une mauvaise marche dans de la neige dure et tenant encore contre le rocher. De cette marche je réussis à me couper une entaille dans la glace même, et la traversée du couloir se trouve accomplie.

L’ascension de la cheminée de glace n’était pas tout à fait réjouissante ; il n’y avait pas possibilité d’échapper aux pierres et autres projectiles, s’ils désiraient tomber, et l’angle de la glace se relevait rapidement jusqu’à la