Page:Mummery - Mes escalades dans les Alpes.djvu/230

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
162
LA DENT DU REQUIN

sommes montés. Slingsby se décorde et nous démontre ensuite qu’il n’y a pas possibilité d’aller plus loin dans cette direction.

Nous passons alors une petite crevasse sur notre droite, et bientôt nous dévalons de nouveau, épouvantés par de grands séracs dans lesquels nous nous préparions tous à témoigner n’avoir pas passé le matin. Slingsby se décorde encore et explore à : nouveau ; cette fois il nous crie de le suivre. Nous nous apercevons bien vite que les grands séracs en perspective ne sont qu’une pure fiction de la nuit et se réduisent à de simples morceaux de glace, et que les crevasses béantes ne sont que des flaques d’eau, ou des sillons dans un glacier couvert de sable.

Grâce à nos crampons a vis, nous descendons assez facilement la langue de glace, nous atteignons le plateau du glacier, et dégringolons pêle-mêle vers notre gîte où nous retrouvons notre camp à 11 h. 45 soir.

Là, Hastings et moi, nous rendant compte de l’ennui de refaire les sacs à la lueur de la lanterne, et aussi de l’avantage de trouver quelqu’un d’autre pour porter notre bagage, nous nous mettons à faire diverses et fallacieuses remarques sur les délices du sac de nuit. Si entraînante fut la peinture que nous fîmes, que Collie déclara ne pas vouloir aller plus loin, et que Slingsby fut,amené au même état d’esprit par mon offre généreuse de lui prêter mon sac de nuit pour s’en servir de matelas. Par cette ingénieuse combinaison, m’étant débarrassé de la nécessité de porter mon bagage, je me sentais désormais capable de descendre au Montenvers ; Hastings, avec la même générosité, offre son sac à Collie. Nous partons donc tous deux, descendant à travers les pierres, les éboulis et les cascades qui conduisent au glacier. Désireux d’éviter la nécessité de sauter d’innombrables crevasses,