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LA DENT DU REQUIN

part dans cette face jusqu’à la plaque de neige, ce n’était pas certain, mais les rochers paraissaient distinctement plus favorables que les dalles situées sous la plaque de neige, et de plus il s’y trouvait un plus grand choix dans les variantes de la route. La seule objection à ce plan était le détour qu’il comportait et la grande quantité de rochers plus ou moins difficiles qu’il serait nécessaire de traverser. On lit remarquer que notre principal but n’était pas une ascension, mais une course d’entraînement, et que de cette façon plus qu’autrement nous aurions l’avantage d’exercer nos muscles et de brûler ce que le professeur Tyndall appelle « effete matters » « les résidus » que la vie anglaise laisse dans les muscles. Il est impossible de résister à la force de ces arguments ; nous nous décidons donc en faveur de l’ascension de la face Sud-Ouest, de la descente de l’arête Sud à la plaque de neige, et de la réascension de l’arête Est.

L’occupation suivante fut de chercher de bons abris pour s’y réfugier dans le cas où le temps deviendrait mauvais et des creux bien secs couverts d’un gazon tendre dans le cas où il ferait beau. Nous faisons alors le thé et nous nous délectons en dégustant un de ces somptueux repas avec lesquels Hastings traite invariablement ses compagnons. Il est inutile d’ajouter que Slingsby et moi donnons à la caravane, une fois de plus, une description pittoresque de l’Aiguille du Plan et des joies que ses pentes de glace peuvent apporter au fervent de la montagne[1]. Cependant, le soleil « dans sa descente des cieux avait glissé sur sa pente occidentale » ; la brise froide du soir nous fait alors penser aux sacs de nuit, chacun se

  1. Cette escalade a été racontée par M. Ellis Carr, l’un des participants de la course, dans un récit intitulé « Deux Jours sur une Pente de Glace » (Alpine Journal, vol. XVI, p. 422, et seq.).