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LE GRÉPON

que, malgré l’assurance répétée par les guides de son infériorité au pic gravi par nous, je serais, tant que je ne l’aurais pas escaladée, abandonné des joies d’un esprit calme et d’une conscience sans remords. Après déjeuner, je me mis à la recherche de Burgener, mais il était invisible, une partie essentielle de son vêtement ayant reçu de si terribles dommages que les efforts prolongés du tailleur local furent nécessaires pour sa réapparition en public. En réponse à mes supplications réitérées, Venetz se mit au lit et Burgener apparut resplendissant dans les vêtements de celui-ci.

Il résulta de notre conversation que Burgener devait être à Martigny le surlendemain matin, en sorte que, pour lui donner le temps, après notre retour du Grépon, de faire en voiture la Tête-Noire, nous résolûmes d’aller le soir même aux chalets de Blaitière Dessous et ainsi de quitter le Montenvers d’assez bonne heure. Le tailleur accomplit dûment sa besogne et relâcha Venetz. Aux environs de 4 h. soir nous montions en fumant vers les chalets, en compagnie d’un porteur.

Nous sommes en partance le lendemain à 2 h. mat., et, suivant la route déjà décrite, nous atteignons la base du premier sommet. Passant à sa droite nous nous laissons couler le long d’un ressaut de cinq mètres et nous remontons en grimpant un rocher lisse jusqu’au tranchant de la grande coupure qui divise l’arête sommitale en deux égales sections. Après un examen minutieux et comme il ne nous apparaissait pas d’autre méthode de descente, nous fixons notre corde de secours, non sans y avoir fait deux ou trois nœuds aux intervalles voulus. Venetz descend le premier, et après une courte inspection il nous fait signe de le suivre. Burgener descend ensuite et je ferme la marche en compagnie du sac et d’un piolet. Je