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LA TEUFELSGRAT

épaisse près du sommet du couloir. Au dessus, de la neige et des rochers faciles nous conduisent sur l’arête. Mais comme nous l’avions craint, la grosse dent nous faisant face était infranchissable, et il devenait certain qu’une autre marche en travers aurait à être exécutée. En arrivant tout près de la dent nous découvrons avec joie dans le roc une fente extraordinaire. La fente est juste assez large pour permettre à quelqu’un de passer au travers et se dirige dans le sens de l’arête, tournant apparemment l’obstacle qui se dresse devant nous.

Je suis sûre que mes compagnons ont partagé le tressaillement de joie qui s’éveilla en moi à cette vue, car Burgener jeta dans les airs un vigoureux jodel, mon mari un joyeux éclat de rire et Andenmatten ne fit plus entendre de plainte. Il nous fallait maintenant exploiter cet affreux et malencontreux tunnel. Quelqu’un dé nous se détacha de la corde et s’enfonça dans ses demi-ténèbres. Ses grognements de dépit pendant qu’il fonçait à travers l’étroit passage, et une finale volée de ces expressions intraduisibles, dans lesquelles l’ennui masculin cherche soulagement, nous apprirent que le trou n’apportait que désillusion et que la montagne s’était jouée de nous. La seule alternative est de tourner l’obstacle par la droite. Burgener nous conduit alors le long d’une corniche étroite, plus ou moins couverte des débris tombés d’en haut. Mais il est nécessaire d’être extrêmement circonspect, car la falaise de gauche est couverte d’un placage de pierres brisées, et il semble que le dérangement d’une seule d’entre elles précipiterait toute cette masse instable sur nos têtes. À droite se trouve un précipice vertigineux de cinq cents mètres ou plus, avec les crevasses du Glacier de Weingarten au dessous. Au bout d’un moment nous atteignons un petit, gendarme qui