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CHAPITRE IV


TÄSCHHORN. — LA TEUFELSGRAT
Par Mmme A.-F. Mummery


Les pentes du Breithorn et les neiges du Weissthor sont supposées marquer la limite des ascensions permises au sexe faible. Ce qu’il y a de vrai, c’est que de graves préjugés se lèvent dès qu’une femme veut tenter de plus grandes difficultés dans la montagne. Il me paraît pourtant que ses capacités sont, en fait, plus adaptées aux difficultés réelles d’une escalade qu’à celles des ascensions de neige dont la mouture monotone est ordinairement considérée comme plus facile.

Les escalades réellement difficiles sont nécessairement faites à une allure plus lente, les haltes y sont assez fréquentes, et, à de rares exceptions près, les alternatives de chaleur et de froid y sont moins fortes. Au contraire, le broiement continu de la neige comporte un effort rigoureux — les haltes dans un sauvage champ de névé sont pratiquement impossibles — et, au danger de la morsure du froid dans le grand matin, succède la certitude des brûlures du soleil dans l’après-midi. L’esprit masculin, pourtant, est généralement imbu de l idée qu’une femme ne peut pas être un camarade utile et agréable, soit dans les pentes abruptes de neige soit dans les précipices de rocher, et, en conséquence, il établit, comme article de foi, que les escalades de la