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armes d’Angleterre, et de l’autre l’inscription suivante, destinée à conserver le souvenir de l’événement qui avait donné lieu à ce superbe présent :

Georgio-Renato Pleville-le-Pelley, no-bili normano Grandivillensi, navis bellicœ portûsque Massiliensis pro prœfecto, ob navim regiam in litiore gallico pericli-tantem virtute diligentiâque suâ serva-tam. Septem vin reinavalis Britannicœ. M.DCCLXX.

Dix ans après, le dévouement de Plé-ville-le-Pelley pour le salut de l’Alarme trouva une récompense non moins honorable, mais d’un autre genre. Son fils, jeune officier de marine, ayant été pris sur une frégate, à la suite d’un combat, en 1780, et conduit en Angleterre, l’amirauté britannique le fit renvoyer en France, sans échange, après l’avoir autorisé à choisir trois de ses camarades pour les emmener avec lui. Cela n’était sans doute, de la part des Anglais, qu’un, acte de justice ; mais une aussi éclatante marque de reconnaissance pour un service rendu depuis tant d’années est un exemple de gratitude trop rare chez les gouvernements pour que l’histoire n’en garde pas les souvenirs.

En 1778, une escadre, armant à Toulon pour aller soutenir la cause des indépendants américains, Pléville-le-Pelley fut désigné pour faire partie de l’expédition. 11 embarqua comme lieutenant à bord du vaisseau le Languedoc, monté par le comte d’Estaing, amiral de l’escadre. Cette armée navale devait se rendre à l’embouchure de la Delaware afin d’y bloquer l’amiral anglais Howe que Washington aurait attaqué par terre ; mais l’ennemi, pressentant ce projet, se retira à Sandy-Hook ; et il y avait dix jours qu’il était sorti de la Delaware, lorsque le comte d’Estaing arriva à l’entrée du fleuve. La présence de l’escadre française devenant inutile sur la côte de Pensylvanie, l’amiral se porta sur Rhode-Island et prit position devant la ville de New-Port, tandis que le général Sullivan et La Fayette débarquaient dans l’île avec 9,000 hommes. La prise* de Rhode-Island paraissait infaillible, lorsque d’Estaing, quittant sa station pour attaquer la flotte anglaise, fut assailli par une tempête qui le força d’aller se réparer à Boston, et l’expédition manqua son but. Notre escadre se rendit ensuite aux Antilles, s’empara de la Grenade et battit l’amiral Byron. Pléville-le-Pelley, qui réunissait aux qualités de l’excellent marin celles qui font l’honnête homme, s’attira bientôt toute la confiance du comte d’Estaing. L’amiral connaissait sa grande activité ; il le savait administrateur éclairé et d’une probité sûre. Ce fut lui qu’il chargea d’aller vendre à la Nouvelle-Angleterre les nombreuses prises faites par nos vaisseaux. Le compte qu’il en rendit à son retour à bord de l’amiral était si satisfaisant, que le comte d’Estaing voulut le récompenser de son zèle en lui allouant une commission de 2 p. 0/0 sur le produit de la vente, qui s’élevait à environ 1S millions. Pléville refusa ces •100,000 écus de gratification, en disant qu’il était satisfait du salaire que le roi lui donnait pour le servir. L’antiquité ne nous offre pas un plus bel exemple de désintéressement. Cela se passait pourtant il y a soixante ans. Dignement apprécié au Nouveau Monde, Pléville reçut du gouvernement américain la décoration de l’ordre de Cincinnatus.

Rentré en France avec son amiral en’ 1780, il apprit en arrivant à Brest qu’il était nommé capitaine de vaisseau. Ce’ grade lui avait été conféré à la sollicitation du comte d’Estaing, qui l’avait demandé en échange de la gratification de 100,000 écus qu’il n’avait pu lui faire