Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, II.djvu/389

Cette page n’a pas encore été corrigée

était déjà si fâcheuse. Ils recueillirent leurs forces et s’avancèrent avec une sorte de fureur à leur rencontre ; mais le général Bourcier arrivait avec sa cavalerie. Ils furent rompus, rejetés partie sur Langueneau, partie sur Jungengen. Le maréchal n’essaya pas de les suivre. Il avait cinq mille prisonniers, des canons, des drapeaux. L’artillerie tonnait sur sa droite avec une force toujours croissante ; il fit un changement de direction et accourut au secours.

« Le feu s’était successivement éteint ; la nuit était noire lorsqu’il arriva. Il établit sa droite à Albeck, sa gauche vers Gottingen, attendant, pour reprendre l’attaque, que le jour vînt l’éclairer. Mais l’Empereur, qui d’abord avait mal apprécié le combat d’Haslach, n’avait pas tardé à revenir de sa méprise. Ses colonnes convergeaient sur Ulm lorsque la nouvelle de cette rencontre lui était parvenue. Il avait pressé la marche de tous ses corps, il était lui-même accouru prendre la direction du mouvement. Bessières s’était porté à Wassen-Horn ; Soult s’était avancé sur Memmingen, et Marmont, établi à Ober-Kirch avait complété l’investissement sur la rive droite. Murat avait passé sur la gauche ; Lannes l’avait suivi et poussait sur Michelsberg, Le maréchal reçut ordre de le soutenir et de se reporter sur les positions qu’il avait quittées la veille. Le jour commençait à poindre ; il prit les armes et se dirigea sur Jungengen. Le général Suchet occupait déjà le village. On se forma, on se déploya, on chercha à embrasser les hauteurs, à tourner les redoutes qui les couvraient.

« Le maréchal avait la droite, Lannes menait la gauche. Tout était disposé ; on marcha, on se mit en mouvement. L’ennemi en position sur le Michelsberg opposa d’abord une vive résistance ; mais attaqué de front, menacé sur ses derrières, il fut obligé de lâcher prise, de se réfugier dans la place. Ney rejetait avec impétuosité dans les faubourgs les colonnes qui lui étaient opposées, que Lannes se débattait encore contre les redoutes qu’il avait en face. Tout à coup celui-ci s’aperçoit que son collègue est maître des hauteurs, se déploie sur les glacis. Il s’indigne de se voir devancer ; il veut à son tour brusquer la fortune : il excite ses généraux, ses chefs de corps, répand partout l’ardeur qui le transporte. Vedel s’élance à la tête de la 17e légère sur les redoutes qui couvrent le Frauenberg et les emporte. Le maréchal Lannes applaudit à ce coup de vigueur et prend le parti de suivre la route que l’intrépide colonel lui a frayée. Ses colonnes sont formées ; il veut forcer, enlever la place, porter le désordre au milieu des bataillons autrichiens, partager avec son collègue la gloire de renverser les derniers obstacles qui les couvrent. Il lance encore la 17e. De son côté, Ney pousse le 50e de ligne et le 6e léger. L’attaque est sur le point de réussir ; ces intrépides soldats ont franchi les ponts, l’ennemi épouvanté jette ses armes. Ils n’ont plus qu’à suivre, qu’à pousser leurs avantages ; mais la fortune est décidée, et l’armée vaincue peut encore rendre un sanglant combat. L’Empereur ne veut pas prodiguer le sang de tant de braves. Il arrête les colonnes, les Autrichiens se remettent de leur stupeur. Le colonel Vedel, avec quelques centaines de soldats, est fait prisonnier.

« Nous étions maîtres de tous les forts, de toutes les avenues. Werneck, battu de nouveau en avant d’Albeck, gagnait la Franconie en désordre. Toute espérance était perdue. Les généraux autrichiens, hors d’état de se dégager par la force des armes, essayèrent de se faire jour à l’aide des négociations. Ils députèrent le prince de Lichtenstein au maréchal,