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plus digne d’une association fondée sur l’amour de la patrie et de la liberté. »

Quelque temps après, Napoléon se fait proclamer Empereur. Voici la lettre de félicitations que lui adressa Malet :

« Citoyen premier Consul, nous réunissons nos vœux à ceux des Français qui désirent voir leur patrie heureuse et libre. Si un empire héréditaire est le seul refuge contre les factions, soyez empereur, mais employez toute l’autorité que votre suprême magistrature vous donne pour que cette nouvelle forme de gouvernement soit constituée de manière à nous préserver de l’incapacité ou de la tyrannie de vos successeurs, et qu’en cédant une portion si précieuse de notre liberté, nous n’encourions pas un jour de la part de nos enfants, le reproche d’avoir sacrifié la leur. »

En même temps, il écrit au général de division Gobert :

« J’ai pensé que, lorsqu’on était forcé par des circonstances impérieuses de donner une telle adhésion, il fallait y mettre de la dignité et ne pas trop ressembler aux grenouilles qui demandent un roi. »

Et il envoie sa démission.

On a dit aussi que Malet appartenait à la société des Philadelphes ; il est au moins certain qu’il ourdit une. conspiration en 1808, pendant que l’Empereur était en Espagne. Trahi par un de ses [ complices, il fut arrêté et 55 personnes i avec lui ; mais au lieu de lui infliger la ’ peine capitale, on se contenta de le retenir dans une prison d’État ; et bientôt ■ cette captivité fut adoucie au point de n’être plus qu’une détention dans une maison de santé à la barrière du Trône.

Cette détention durait depuis quatre ans lorsque cet esprit sombre, entreprenant, conçut, dans l’ennui de sa prison, le hardi projet de tenter une révolution à lui seul, sans autre moyen qu’un cri funèbre dont il devait faire retentir tout Paris. Ce cri, c’était : VEmpereur est mort.

Le grand éloignement de Napoléon, son expédition aventureuse au fond de la Russie, l’irrégularité et l’interruption fréquente des courriers avaient préparé les esprits. De graves inquiétudes circulaient dans Paris, et le conspirateur avait calculé toutes les chances qu’un premier moment de stupeur pourrait donner à qui saurait oser.

Au mois d’octobre 4812, le régiment de la Garde de Paris et quelques cohortes de la Garde nationale mobilisée formaient la garnison de la capitale. Le régiment de la Garde de Paris avait la même destination que l’ancien guet de cette ville, un service sédentaire ; il se composait en grande partie de jeunes soldats enrôlés avant l’âge pour éviter la conscription et presque tous mariés. C’était une espèce de gendarmerie à pied. Dans la campagne de Prusse, on avait cependant dirigé ce régiment sur Dantzig. Il redoutait une seconde campagne, et la promesse de la paix générale devait le séduire. Elle devait plaire également à la dixième cohorte formée d’hommes échappés aux précédents tirages, et qu’une mesure récente avait arrachés à leurs foyers, lorsqu’ils se croyaient définitivement libérés. Les cohortes étaient commandées par de vieux officiers républicains, réformés à cause de leurs opinions, au commencement de l’Empire, et rappelés plus tard faute d’autres.

Que ferait-on, se dit Malet, si l’on apprenait tout à coup que Napoléon est mort à 600 lieues de sa capitale ? point de Conseil de régence, rien n’a été prévu ; le Sénat s’assemblerait aussitôt. Je le rassemblerai ; le Sénat ferait une proclamation, je la.rédigerai et la ferai adopter. »

Sautant à pieds joints sur les confidences, sur les associations, sur les délibérations, les hésitations et les lenteur,