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Cette pièce est assez correcte, elle promettait. On l’a tirée du cabinet de M. le comte de Weymars.

Le 15 ou le 16 septembre 1783, le chevalier de Kéralio, maréchal-de-camp et sous-inspecteur général des écoles royales militaires de France, arriva à Brienne. Après avoir examiné les élèves de cette école, il désigna le jeune Napoléon pour celle de Paris. Les moines lui firent observer que cet enfant n’était fort que sur les mathématiques ; qu’il serait mieux d’attendre à l’année suivante pour lui laisser le temps de se fortifier dans la langue latine : Je sais ce que je fais, reprit l’examinateur, si je passe sur la règle, ce n’est point une faveur de famille ; je ne connais point celle de cet enfant ; c’est tout à cause de lui-même. J’aperçois ici une étincelle qu’on ne saurait trop cultiver. Et puis M. de Kéralio rédigea la note suivante :

« M. de Bonaparte (Napoléon), né le 15 août 1769 : taille de 4 pieds 10 pouces 10 lignes ; de bonne constitution, d’excellente santé ; caractère soumis. Il a fait sa quatrième. Honnête et reconnaissant, sa conduite est très-régulière. Il s’est toujours distingué par son application aux mathématiques ; il sait passablement l’histoire et la géographie ; il est faible dans les exercices d’agrément. Ce sera un excellent marin. Mérite de passer à l’école de Paris. »

Une brochure de 45 pages, publiée en anglais, en l’an VI, et traduite en français par Bourgoing, ayant pour titre : Quelques notices sur les premières années de Bonaparte, par un de ses condisciples (Phélipeaux, à ce qu’on croit), se termine ainsi :

« … Tel est l’homme dont j’ai vu les talents et les vertus au berceau. Je ne serai point taxé de partialité à son égard ; dans sa première jeunesse je le considérais, je l’admirais même quelquefois, mais je ne l’aimais pas, et lui, très-peu liant, ne faisait pas d’exception en ma faveur. Depuis, je l’ai perdu de vue. Je n’attends ni ne crains rien de lui. Peut-être ne serai-je jamais son concitoyen, mais je m’honorerai d’avoir été son condisciple. »

Le 19 octobre 1784, Napoléon arriva à l’école de Paris accompagné d’un minime chargé de veiller sur lui.

À cette école, il eut pour maîtres de mathématiques le célèbre Monge et M. l’Abbey.

M. de l’Éguille, professeur d’histoire, dans un compte qu’il rendit sur les progrès de ses élèves, nota ainsi le jeune Napoléon : « Corse de nation et de caractère, il ira loin si les circonstances le favorisent. » Ce professeur y voyait de loin !

M. Domairon, qui enseignait les belles-lettres dans le même établissement, disait qu’il avait toujours été frappé de la bizarrerie des amplifications de Napoléon : il les comparaît à du granit chauffé à un volcan.

Bauër, le professeur d’allemand, n’en était pas aussi satisfait ; son élève ne faisait aucun progrès dans cette langue. Ce bon Germain entendant dire un jour que le petit Bonaparte était le meilleur mathématicien de l’école. Cela ne me surprend point, s’écria-t-il, j’ai toujours entendu dire que les mathématiques ne sont faciles qu’aux ânes. — Pauvre Bauër !

Le 15 mai 1785, Bonaparte fut confirmé par Leclerc de Juigné, archevêque de Paris, qui lui demanda son nom de baptême : Napoléon. — Mais ce saint ne figure pas dans le calendrier.Il n’y a rien là de surprenant, Monseigneur, le nombre des saints est bien plus grand que celui des jours de l’année.

Deux mois plus tard il eut à répondre aux questions que lui fit Laplace, examinateur des aspirants au corps royal d’artillerie,